1. Le chef-lieu familial avant 1210 : Termes - Olivier de Termes, une épopée au XIIIe siècle

Aller au contenu
1. Le chef-lieu familial avant 1210 : Termes
Mot d'introduction :

La présentation de l'épopée d'Olivier de Termes, avec une vie s'étalant de 1200 (env.) à 1274, se fait ici en une douzaine de pages web, faisant office de développement à une exposition avec autant de panneaux, visible à partir d'août 2024.

Les démarches et politiques de développement local ont, depuis les années 1980 dans l'Aude, pris l'histoire des lieux et châteaux du "Pays Cathare" comme une ressource favorisant l'économie touristique, la valorisation patrimoniale, les animations et la vie culturelle. Il est possible de le dire : en voici une de plus ! Mais cette réalisation est à considérer aussi dans le cadre des actions favorisant la candidature à l'UNESCO de la série de châteaux "sentinelles de montagne" et la cité de Carcassonne.

Car évoquer les aspects de la vie d'Olivier de Termes, c'est se projeter dans le contexte historique qui a fait ces monuments, ces châteaux, qui sont les emblèmes de nos territoires. Ainsi, ce grand seigneur du moyen âge méridional sera ici le vecteur d'une meilleure compréhension de ces monuments historiques... et donc de l'identité actuelle de ces lieux.

Bonne lecture, bonne consultation !
 

Carte de la «Marca Hispanica», «Navarri» et «Wasconia» en 806 dressée par Auguste Longnon, 1876. Public domain, via Wikimedia Commons
Le contexte géographique :

"Olivier de Termes"... comme avec de nombreux seigneurs féodaux, le patronyme indique son fief, le lieu formant l'origine de son lignage seigneurial. Ce suite à la constitution de la lignée par le premier seigneur de Termes connu : Olivier Bernardi. Mais avant de se focaliser sur cet endroit des Hautes-Corbières, il convient d'évoquer en quelques lignes certains éléments de cadrage.

Expliquer la situation des Corbières au XIIIe siècle implique de remonter... disons, jusqu'aux années 800, avec le fameux Charlemagne et la dynastie des Carolingiens. Suite à une poussée des musulmans sur toute la péninsule ibère, et jusque dans l'actuelle France, les chrétiens ont réinvesti le massif des Pyrénées et le piémont espagnol, formant la "Marche d'Espagne".

Cet ensemble, dépendant formellement de ce qui va devenir le royaume de France, va au gré de la déliquescence du pouvoir central, et au gré du processus de recomposition des pouvoirs bien connu comme "la féodalité"*, voir émerger et s'organiser tout un réseau de grands seigneurs, "comtes" etc... lesquels, au XIe siècle, sont à l'issu de ce processus, liés les uns avec les autres par divers liens d'interdépendance complexe, les hommages etc, amenant à une hiérarchie entre le fameux "suzerain", et son "vassal".
Ainsi, au XIIe siècle (et nous résumons à grands traits) nous sommes ici dans les terres d'un comté nommé "Razés"*, dans une principauté assez autonome dominée par les Vicomtes de Béziers-Albi-Carcassonne : les Trencavel*, dont les terres sont à la jonction de deux entités comtales de premier ordre : les comtés de Toulouse au nord-ouest, le comté de Barcelone (puis Royaume d'Aragon) au sud.
Ces deux entités, de part et d'autre des Pyrénées, partagent beaucoup de choses, et les Corbières sont donc au cœur d'un sous-ensemble de la civilisation chrétienne occidentale : le domaine occitano-catalan. Ce qui n'empêche pas de fortes rivalités, et une grande guerre méridionale* marque, entre Toulouse et Barcelone, le XIIe siècle, sinon impacté par l'expansion économique et démographique.
Les Pyrénées forment alors une barrière physique, mais assez peu politique ou culturelle. Il y a des frontières, certes, mais au contraire de beaucoup de travaux cartographiques influencés par la frontière moderne entre France et Espagne (voir ci-dessous), il ne faut pas du tout séparer les habitants du nord du Roussillon et des Pyrénées, de ceux du sud. Au début du XIIIe siècle, ces territoires, ces habitants, ces dynasties seigneuriales, sont très liées.
Nous allons l'observer avec l'évocation de la famille seigneuriale de Termes et de ses alliances. Plus loin, nous verrons qu'Olivier de Termes contribuera à la fixation de "la" frontière !

La seigneurie des Termes

Le premier acte mentionnant un aieul de cette lignée date des années 1065 et c'est un certain... Olivarus Bernardi de Termino qui prête serment à l'archevêque de Narbonne Guifred de Cerdagne. Il est déjà notable que cet hommage contienne des réserves : le seigneur de Termes sera au service... "sauf et excepté contre le comte Roger, sa femme Rangarde et leurs successeurs comtes de Carcassonne et Razés ; le comte de Barcelone et sa femme ; les vassaux de [cet] Olivier".

Nous avons là tout de suite un aperçu du contexte médiéval qui nous intéresse ici : les Termes profitent de leur situation à la limite des dominations pour amender leurs serments de fidélité avec des clauses et réserves leur permettant d'éviter de prendre parti dans les conflits de leurs suzerains. Autres caractéristiques "familiales" semble t'il : la limitation des naissances associée à la primogéniture masculine, ce qui permet d'éviter la dispersion de la seigneurie au gré des héritages. Et bien entendu, quelques mariages habiles avec les seigneuries voisines, c'est incontournable.

Le résultat : un territoire seigneurial qui s'agrandit, et qui malgré le relief, les pentes et les rochers, fournit des richesses. Agro-pastorales bien sûr, mais aussi issues de l'exploitation minière (voir plus loin).

Voir ci-après un essai de cartographie de la seigneurie proposé par M Gauthier LANGLOIS.


Les parents d'Olivier : Raimond de Termes et Ermessende de Corsavy

Raimond n'est pas l'aîné, et c'est initialement Peire-Olivier de Termes qui gère l'héritage familial. Les circonstances font que c'est tout de même Raimond qui se retrouve à devoir assurer la suite du lignage. Ainsi, alors qu'il a dépassé les quarante ans, il se marie en 1197 à la jeune Ermessende de Corsavy, qui amène au domaine ses possessions en Vallespir, le versant sud du Canigou. Avec là aussi des richesses minières. Raimond de Termes va assez vite gérer ces deux ensembles comme les siens. Notons que de ce mariage sont issus quatre enfants : Raimonde, Olivier, Bernard, Blanche.

Une famille cathare ?

Né à priori aux alentours de 1200, Olivier passe donc son enfance en Termenès, dans les années qui précèdent le déclenchement de la croisade contre les albigeois, contre les hérétiques dits cathares. Divers indices nous assurent du fait que certains membres de la famille et de l'entourage ont visiblement été cathares.

Le plus connu est Benoît de Termes. Ce n'est pas strictement établi par les historiens, mais c'est très probablement le frère cadet de Raimond, donc l'oncle religieux d'Olivier. Et un religieux qui se retrouve, en 1207, à défendre les thèses hérétiques lors du colloque (ou dispute théologique) de Montréal. Il est alors le "frère mineur" de l'évêque cathare du Carcassés. Dans la suite de l'histoire, Benoît de Termes deviendra lui-même évêque, en 1226, mais pour le Razès.

Il faut aussi citer Rixovende de Termes, cousine germaine de Raimond de Termes, mariée en secondes noces avec le vicomte Guilhem de Minerve... initiant l'alliance entre ces deux maisons seigneuriales. Et côté Minerve, la pratique hérétique est attestée. Le père, Raimond de Termes, était un "vieillard livré à un sens réprouvé et hérétique avéré" à en croire le propagandiste de la croisade, le chroniqueur Pierre des Vaux de Cernay. Mais les sources contradictoires manquent pour confirmer la chose.  

Devenu adulte, Olivier de Termes est très souvent en compagnie de seigneurs que l'Église accuse pour leur tolérance ou leurs agissements en faveur des hérétiques. Certains seigneurs étant assurément hérétiques. Mais d'autres voyant leur intérêt à affaiblir l'institution concurrente à leur pouvoir qu'est l'Église, mais sans pour autant abandonner le dogme catholique.

Un entourage donc pour partie hérétique ou à minima sympathisant. Aussi, que ce soit au nom du service dû au suzerain, le vicomte Trencavel, ou au nom de la défense de familiers cathares, quand la croisade contre les albigeois se déclenche, Raimond de Termes rejoint la résistance méridionale.

Les habitants de Carcassonne expulsés de la ville après le siège en 1209.
Atelier de Maître de Boucicaut — Grandes Chroniques de France, BL Cotton MS Nero E II
La croisade des barons, le siège de Termes

Olivier n'est donc qu'un enfant quand en 1209 l'armée croisée déferle sur la Vicomté Trencavel. Un événement bien documenté et retranscrit sur de nombreuses ressources, nous ne le détaillons pas ici. Au besoin, voir par exemple : https://fr.wikipedia.org/wiki/Croisade_des_albigeois

On ne sait pas si Raimond de Termes a participé à la défense de Carcassonne, mais c'est dans la logique des choses. (Pour en savoir plus, voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Siège_de_Carcassonne_(1209))

Mais c'est surtout en 1210 que Termes est confrontée aux événements. Avec, suite à la prise de Minerve, la venue de l'armée croisée commandée par Simon de Montfort, qui organise le siège du castrum. On ne sait pas si Olivier, en tant qu'héritier du lignage, est resté auprès de ses parents ou encore de Rixovende de Termes.

Ce siège, entamé en début août 1210, va se prolonger jusqu'au 23 novembre et se solder par la victoire des croisés. C'est un épisode relativement documenté à découvrir par ailleurs (surtout lors d'une visite du site), formant un basculement pour la jeune vie d'Olivier : son père se retrouve suite à la prise du castrum emprisonné à Carcassonne, où il va mourir quelque temps après. Le castrum et l'ensemble du fief familial est confisqué, donné par la suite (en 1214) à un croisé d'île de France nommé Alain de Roucy, selon l'usage fait pour les terres "exposée en proie" des ennemis de la croisade.

Bien que jeune enfant, à ce moment là, Olivier se retrouve dans la situation des nombreux seigneurs méridionaux dépossédés de leurs biens par la croisade et l'Eglise. On nomme ces seigneurs les faydits : https://fr.wikipedia.org/wiki/Faydit_(croisade)

Le castrum de Termes en 1210
Illustration de l'aspect des lieux de la prime enfance d'Olivier de Termes, par Alexandre AVARA.
Quelques indices de terrain permettent d'avoir une base pour cette hypothèse, mais il y a beaucoup d'inconnues.
L'aspect est donc "plausible", mais c'est une proposition à visée pédagogique et illustrative surtout !
Avant de poursuivre sur une seconde page,
voici le rappel de quelques étapes historiques essentielles :
De nos jours...

Termes est un tout petit village de moins de 50 habitants, qui au lieu d'être sur un promontoire, est désormais installé en fond de vallée. La commune a ses reliefs surtout recouvert de forêts et garrigues, c'est un terrain d'explorations pour les randonneurs du GR 36. Mais c'est surtout une commune à vocation touristique, avec comme "produits d'appel" le village, le château et les gorges. Celles-ci sont le lieu de pratique du canyoning ou de la baignade.

Le château, bien que démantelé au XVIIe siècle, est l'objet de visites et de valorisations qui se poursuivent. La toute petite équipe d'agents du patrimoine améliore régulièrement les outils de médiation et de visite, ou encore... organise des choses liées à Olivier de Termes !

Les liens :
    
Quelques ressources et liens pour en savoir plus :

comments powered by Disqus
"Olivier de Termes, une épopée au XIIIe siècle"
Une médiation numérique.
Une exposition pour l'été 2024.
Une réalisation de la mairie de Termes et de l'Association de Sauvegarde du château de Termes.
Retourner au contenu